La Cour de cassation a rendu le 6 avril 2016 un arrêt qui ne plaira pas aux professionnels de la vente immobilière. Dans cette décision elle a refusé l’indemnisation d’un agent immobilier, en limitant la portée du mandat d’exclusivité à sa plus simple définition.
Le mandat immobilier peut conférer à l’agent mandaté par le vendeur d’un bien immobilier l’exclusivité de la vente de son bien. Ce dernier, lorsque le mandat est exclusif, ne peut alors pas vendre le bien sans passer par lui.
En l’espèce les faits concernaient la vente d’un bien pour laquelle des particuliers s’étaient tournés vers une agence, à qui ils avaient justement confié l’exclusivité de la vente.
Cependant après l’expiration de cette période d’exclusivité l’agence avait fait visiter la maison à un autre couple souhaitant acquérir le bien. Après que l’agence se soit occupée des négociations, ces deniers avaient fait une offre.
Cependant, le lendemain de cette offre, qui était valable pendant encore 6 jours, les acheteurs avaient été avertis que des tiers avaient formulé une offre plus intéressante. Ne souhaitant pas perdre le bénéfice de la vente, ils s’étaient alors tournés vers une autre agence et avaient à leur tour formé une offre plus élevée.
La seconde offre, formulée par une autre agence que celle ayant introduit les deux parties de la vente et réalisée les premières négociations, avait alors été acceptée par les vendeurs.
La première agence perdait dans cette opération la commission prévue pour la vente de la maison, puisque celle-ci avait été empochée par la seconde agence. Estimant que les acheteurs avaient, par leurs pratiques, commis une faute lui ayant porté préjudice, elle avait porté le litige devant la justice.
Au visa de l’article 1382 du Code civil, elle demandait la réparation de la perte de la commission qui, selon elle, était due au comportement des acheteurs qui, alors qu’elle avait fait visiter la maison, entamé des négociations et formulé une première offre, l’avaient délaissée au profit d’une autre agence, ce qui constituait un comportement déloyal et fautif.
Le raisonnement de l’agence était finalement de penser que les relations qu’elle avait eues avec les acheteurs les liaient de sorte quasi-contractuelle.
Si le tribunal de première instance approuve le raisonnement, la cour d’appel et la Cour de cassation viennent pourtant rejeter ses demandes d’indemnisation. A priori, le dommage semblait pourtant existant pour l’agence, il convient donc d’étudier le raisonnement de la Cour de cassation pour comprendre un tel rejet.
Cette dernière énonce que « n'est pas fautif le fait, pour l'acquéreur non lié contractuellement à l'agent immobilier par l'intermédiaire duquel il a visité le bien, d'adresser une nouvelle offre d'achat aux vendeurs par l'intermédiaire d'un autre agent immobilier également mandaté par ces derniers ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a décidé qu'il était loisible [aux acheteurs], qu'aucun contrat ne liait au [plaignant] dont la clause d'exclusivité était expirée, de recourir, sans faute de leur part, à une autre agence immobilière pour proposer une nouvelle offre d'achat aux vendeurs ».
Finalement la Cour de cassation adopte un raisonnement pragmatique, non dénué d’une certaine logique, bien que préjudiciable à l’agence lésée dans ses relations commerciales.
Les juges estiment que le comportement fautif aurait été caractérisé avec l’existence d’un mandat d’exclusivité. Or en l’espèce il n’existait pas de tel mandat. Ainsi en l’absence de contrat, le comportement des acheteurs n’était pas constitutif d’une faute, et ne pouvait pas permettre à l’agence d’être indemnisé pour son préjudice, bien que celui-ci semble effectivement existant.
C’est en cela qu’il s’agit d’une décision intéressante, puisqu’elle a le mérite de rappeler aux professionnels qu’afin que soit constituée une faute il est nécessaire que la relation d’affaires soit encadrée par un contrat, dont les termes seraient rompus par l’autre partie. Dans cette affaire ce n’était pas le cas et la perte de commission de l’agence, bien que préjudiciable, ne lui permettra pas d’être indemnisée.
L'arrêt rendu par la Cour de cassation le 6 avril 2016 mérite quelques éclaircissements. Dans cette dernière une agence immobilière réclamait la réparation de son préjudice du fait des pratiques, qu'elle jugeait déloyales, d'un acheteur. Dans cette décision, la Cour de cassation rappelle l'importance du contrat, et donc dans ce type de situation, du mandat immobilier.