À compter du 1er novembre 2016, les patrons attribuant des voitures de fonction à certains de leurs salariés auront l’obligation de dénoncer tout conducteur auteur d’une infraction sur la route.
Dans le contexte socialement agité du moment, le vote de cette loi par les parlementaires le 24 mai dernier s’est fait en toute discrétion, et l’État ne prévoit pas de seconde lecture. Concrètement, lorsqu’un dirigeant d’entreprise reçoit un PV relatif à une infraction constatée par un radar, une vidéo ou un autre système automatisé, et que cette infraction est le fait d’une des voitures de fonction de sa flotte, il doit dénoncer le salarié responsable.
Tout manquement à cette nouvelle obligation expose le représentant légal de l’entreprise à une amende de 675 € (4e classe) dont le minimum et le maximum sont fixés à 450 € et 1875 € respectivement.
Le texte précise par ailleurs que la personne morale dispose de 45 jours à compter de la date d’envoi de la contravention pour faire parvenir au Ministère public l’identité et l’adresse de la personne physique qui se trouvait au volant. Alternativement, elle doit apporter la preuve d’un vol du véhicule concerné, d’une utilisation frauduleuse du numéro d’immatriculation ou d’un cas de force majeure. Cette communication peut se faire par la voie électronique ou via un courrier recommandé avec accusé de réception.
Mais cette loi comporte présente une lacune majeure. En effet, elle repose sur le délai de 45 jours décompté depuis l’expédition de l’avis de contravention à l’entreprise propriétaire de la voiture de fonction. Or, cet envoi se faisant systématiquement par voie postale via un courrier simple, il est difficile d’établir ce délai avec exactitude, voire de prouver qu’il a bien été effectué.
Si la nouvelle disposition légale vise à rendre tous les automobilistes égaux devant les sanctions, elle est incohérente, l’obligation de dénonciation allant à l’encontre de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme. En outre, elle réclame l’identité du conducteur au moment de l’infraction (et non du supposé conducteur), information dont l’employeur ne peut être certain à 100 %, par exemple si le salarié a laissé conduire un tiers.
Or, elle lui fait risquer une dénonciation calomnieuse, laquelle constitue un délit. Une aubaine pour les avocats.