Dans un article récent, l’hebdomadaire italien L’Espresso accuse la plateforme de pétitions en ligne Change.org de vendre les données personnelles de ses utilisateurs sans leur accord. Une information rapidement démentie (à demi-mot) par le site sur sa page Facebook.
De grandes campagnes nationales aux mobilisations locales… Près de 4000 pétitions sont lancées chaque jour sur le site Change.org. Et plus de 8 millions de Français avouent avoir déjà utilisé les services de la plateforme.
À première vue, Change.org présente toutes les caractéristiques d'un mouvement social, permettant à des gens de tous bords de se mobiliser, de se regrouper et d’agir ensemble pour soutenir une cause commune. Il peut s’agir d’une pétition contre l'avant-projet de la loi El Khomri à celle de la Fondation L’Oréal et son manifeste pour la gent féminine dans la science.
Le site lui-même se décrit comme « la plateforme mondiale pour le changement ». Un slogan fort qui a de quoi rassurer les internautes. D’ailleurs, le nom lui-même – Change.org – suscite de profondes émotions qui laissent plein d'espoir pour l'avenir, aussi intangible soit-il.
Mais voilà, comme le révèle récemment l’hebdomadaire italien L’Espresso, Change.org n’est pas seulement une plateforme associative, contrairement à ce que laisse penser son extension en .org (pour rappel, tous les sites gouvernementaux sont en .org). Celui-ci serait en fait un business très lucratif basé sur le financement par la publicité.
Attention toutefois à ne pas s'y méprendre. Il ne s’agit pas de la publicité web traditionnelle ciblée qu’on a l’habitude de croiser sur la Toile, et qui consiste à bombarder l’internaute de bannières publicitaires vantant les services d’un hôtel de luxe en Australie ou tout simplement cherchant à lui vendre le dernier-né de la gamme iPhone.
Loin de là. Il s'agit plutôt d'un business model basé sur la collecte et la revente de données personnelles à des fins commerciales, un peu comme le font certains géants du web comme Facebook ou Google. L’Espresso révèle ainsi que les coordonnées des signataires sont facturées entre 85 centimes et 1,5 euro. Et les prix peuvent varier selon le nombre total (de moins de 10 000 personnes à plus de 500 000).
Face à ces accusations, Change.org a rapidement réagi sur sa page Facebook en publiant le message suivant :
Contrairement à ce que laisse entendre le titre de l’article italien, Change.org ne commercialise les données de ses utilisateurs que dans le cadre de pétitions sponsorisées, et uniquement après accord individuel de l’utilisateur – au cas par cas –, de communiquer ses coordonnées au sponsor de la pétition en question
Or, dans ses conditions, la plateforme indique clairement que « certaines organisations paient pour promouvoir leurs campagnes, mais nous ne partageons pas vos coordonnées avec elles sans votre consentement (…) Si nous obtenons votre autorisation, nous partagerons des informations vous concernant avec nos annonceurs, y compris votre adresse e-mail, votre adresse postale et la pétition que vous avez signée ».
Et c’est là que le bât blesse. Puisque lors de la signature d’une pétition sponsorisée, la case « Tenez-moi au courant de cette campagne et des autres venant de... », qui fait office d’accord, est discrètement précochée, ce qui peut échapper à la vigilance de l’internaute.
Rappelons que cette pratique est interdite par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Il faut que dire que la polémique lancée par L’Espresso intervient au même moment où Change.org annonce avoir changé son business modèle.
Plutôt que d’exploiter les données personnelles de ses utilisateurs, le site va désormais se lancer dans le financement participatif, un secteur aujourd’hui très encadré, comme en témoigne l’entrée en vigueur de nombreuses « lois crowdfunding » ces dernières années.