Peut-on imaginer un monde où le steak tartare ne provient pas d’un bœuf issu de l’élevage ? En l’état actuel des choses, c’est difficilement concevable. Pourtant, des biotechs américaines et européennes sont déjà bien avancées dans leurs recherches autour de la viande artificielle. Et les investisseurs commencent à affluer de partout.
Tout au début des céréales OGM, les débats allaient bon train sur l’avenir incertain de ces produits. Ces aliments se retrouvent actuellement dans de nombreux produits que l’on consomme au quotidien, même si leur part diminue progressivement. La viande artificielle connaîtra-t-elle le même sort ? La tendance actuelle se penche plutôt en faveur de cette innovation, qui semble résoudre plusieurs problèmes liés à la consommation de protéines animales.
Les amoureux de l’environnement y trouvent leur compte, de même que les végans et les défenseurs de la cause animale. De plus en plus d’acteurs se lancent dans ce filon, soutenus par des investisseurs, qui eux aussi sont séduits par le concept.
Aleph Farms, une start-up israélienne, et Memphis Meats, une biotech américaine, ont récemment fait parler d’elles, en levant respectivement 105 millions et 160 millions de dollars dans le cadre d’une campagne de financement participatif très suivie par les observateurs et les investisseurs. Cet intérêt marqué du marché s’explique par le positionnement atypique des deux entreprises : elles développent actuellement une technologie permettant de produire de la viande artificielle .
Leur innovation se trouve déjà à un stade avancé, d’où le fort attrait de la collecte auprès des investisseurs particuliers et institutionnels. La culture d’innovation si particulière des États-Unis et d’Israël y est aussi pour quelque chose, selon certains analystes. Mais, avant de commercialiser leurs produits, ces entreprises doivent encore obtenir l’approbation des régulateurs . Si cette étape relève presque de la formalité outre-Atlantique, elle s’annonce plus ardue en Europe, où les autorités se montrent souvent plus pointilleuses et plus réticentes aux innovations de rupture, surtout celles qui touchent à l’alimentation et à la santé de l’homme.
C’est pourquoi l’Asie et les États-Unis ont un temps d’avance dans ce secteur, souligne un expert financier. À Singapour, un restaurant célèbre a servi à ses clients du poulet reconstitué fin 2020 , un événement inédit. Ces hésitations ne signifient pas pour autant que l’Europe refuse complètement d’autoriser ces nouveaux produits. Les autorités du Vieux Continent discutent déjà avec les entreprises impliquées pour évaluer le rapport risque/bénéfice.
ImportantCertaines start-ups ont même obtenu des financements pour leurs travaux dans ce domaine.
En France, des entreprises comme Core Biogenesis sont les pionnières de la viande artificielle. Cette start-up est connue pour sa technologie de production de masse de molécules biologiques. Elle fait partie des trois biotechs les plus en vue dans le milieu, aux côtés de Vital Meat (culture de cellules animales) et Gourmey (foie gras vegan). Ces entreprises disposent déjà d’un concept prometteur, mais ont encore besoin de fonds pour construire une unité de production test , en vue d’une production à grande échelle en usine.
Il leur faudra donc convaincre les investisseurs à propos du bien-fondé de leur démarche et de sa rentabilité. La tâche sera relativement simple, puisque les motifs écologiques et éthiques derrière la création de viande animale sont évidents. Puis, la viande constitue une véritable mine d’or d’un point de vue financier, le marché mondial étant évalué à 1 500 milliards de dollars par an.